Courir le castor et courir le jupon La grande ordonnance de 1673 avait stipulé ...Sa Majesté, étant informée que quelques habitants établis en ce pays, se rendent vagabonds dans les bois sous prétexte de chasse et de commerce de pelleteries avec les sauvages, ce qui étant entièrement contraire à l'établissement de la colonie de ce dit pays, sa dite Majesté a fait très expresses inhibitions et défenses à tous Français de ce dit pays, domiciliés ou non domiciliés, de sortir ni abandonner leurs maisons et vaquer dans le bois plus de vingt-quatre heures sans la permission expresse du gouverneur et lieutenant-général de ce pays, à peine de la vie... Justement, sous peine de mort, beaucoup qui ont quitté, n'osent plus rentrer. En plus dudéfrichement plutôt rude, l'agriculture pour ces militaires sans expérience agricole est manifestement rébarbative. Mais il n'y avait pas que le castor qui attirait les jeunes mâles vers les Pays-d'en-Haut. La Nouvelle-France était endéficit d'éléments féminins. Il manque des épouses à ces soldats démobilisés, qui vieillissent. Il y a 5 375 hommes contre 4 302 femmes en 1681 dans la colonie. Même l'avenir s'annonce déficitaire: on recense 3 835 enfants mâles nonmariés et 2 783 jeunes filles non mariées. Il manque déjà 1 000 femmes et la relève nécessiterait 1 000 demoiselles supplémentaires. A Chambly, on dénombre 46 hommes contre 32 femmes. A Boucherville, 102 hommes contre 77 femmes. Les veuves avec dot trouvent vite preneur. Marguerite Viard est rapidement courtisé par trois maris successifs. Charles Robert de Chambly est parvenu à trente-six ans d'âge quand il prend une épouse de quatorze ans, en 1681. A Contrecoeur, en 1682, Jean Faiolle a quarante ans, son épouse Marie Paviot, treize ans; Nicolas Bonin, trente ans et son épouse, Marie Hémerie, treize ans. Ces hommes vieillissants épousent des enfants ! Par ailleurs, la réputation d'hospitalité des indiennes a fait son chemin. Depuis Ulysse, le chant des sirènes n'a pas cessé d'appeler des joyeux rameurs a faire de beaux voyages ! En dâepit des ordonnances, le nombre de coureurs de bois augmente. L'intendant qui était responsable au roi de l'augmentation annuelle des arpents défrichés et cultivés, voulait supprimer la course dans les bois et ramener les coureurs à la culture. L'automne de 1680, l'intendant Duchesneau écrivait au ministre, que huit cents hommes avaient de cette façon déserté la colonie...Huit cents terres restées en friche... Les faiseurs d'argent trouvaient commode de dépeupler nos jeunes paroisses et d'arrêter l'élan de la colonisation, notait Benajmin Sulte. (Sulte, Histoire des Canadiens français, tome 5, pages 51, 52). Frontenac favorisait la liberté de la traite; ce que justement l'intendant Duchesneau réprimait, pendant que l'évêque pestait contre la vente d'eau de vie et le libertinage chez les indiens. En août 1681, l'amnistie royale en faveur des coureurs de bois parvint dans la colonie. Les trappeurs pourraient revenir. Mais on se dispute sur l'opportunité de la leur faire savoir ou non. Le gouverneur s'y refusait. C'était la confusion administrative en Nouvelle-France. Frontenac et Duchesneau seront rappelés en France en 1682. C'est cet intendant Duchesneau qui avait ordonné le recensement en 1680, dont les relevés furent faits en 1681. |
7 Il était une année autour de 1672, à Québec, petit bourg... Automne 1671, en Nouvelle-France, un bateau accoste ayant à son bord Les Filles du Roi avec leurs certificats des lieux où les dites filles ont été prises et qui font connaître qu'elles sont libres et en état de se marier sans difficulté. La traversée a été épouvantable. Elles ont cru mourir cent fois. Mais les voilà arrivées à bon port. Elles furent accueillies par d'affectueux célibataires en quête d'épouse. Plusieurs d'entre elles sont hébergées quelque temps chez les Hospitalières de l'Hôtel-Dieu. Il leur faut s'habituer à leur nouvel environnement car plusieurs de ces femmes nées en milieu urbain n'étaient pas préparées à la vie ardue des paysannes. D'autres sont placées dans des familles connues pour se refaire une santé et une beauté en attendant que les soldats qui les demandent forment quelques établissements et acquièrent de quoi les nourrir. Elles sont pourvues d'un trousseau et dans certains cas d'une mince dot; le Gouverneur ajoute souvent une cinquantaine de livres. Quelques jours seulement après leur arrivée, presque toutes sont acclimatées. Elles regardent l'avenir avec confiance. Elles respirent un air pur qui étourdit. Elles trouvent ça beau ici. Elles aiment déjà leur nouveau pays. L'une d'elles, Marguerite Viard, devient une participante vitale de cette histoire. Plusieurs prétendants la courtisent afin de fonder une famille. Le jeudi 15 octobre 1671, un contrat de mariage est rédigé par le notaire Romain Becquet entre Simon Davault et Marguerite Viard. 8 Faut croire que Marguerite n'était pas fixée, puisqu'elle se présente de nouveau le lundi 2 novembre 1671, devant le même notaire, pour un contrat de mariage avec Jean Fleuricourt qui avait lui aussi passé un contrat le 8 octobre 1671 avec Jeanne Olivier. Encore une fois, ce contrat n'a pas donné suite. Originaire de Villée, Ville-de-Château, évêché d'Angers, un soldat du régiment Carignan-Salières recherche, comme beaucoup de célibataires dans la colonie, une épouse. Cette Fille du Roi a eu un effet déterminant sur l'avenir de Mathurin. Marguerite Viard, l'une d'elles, est intéressante. Membre de la compagnie de La Durantaye il avait quitté La Rochelle en 1664 à bord du Brézé, un modèle réduit est suspendu dans l'église Notre-Dame des Victoires à Québec, pour une campagne dans les Antilles. Puis, au printemps de 1665, il est laissé, avec sa compagnie sur les rives de Percé pour venir grossir les rangs des soldats dans la guerre avec les Indiens. Il a été démobilisé en 1668 et avait choisi de demeurer en Nouvelle-France. Sans métier connu, il a probablement proposé ses bras à qui voulait bien lui donner nourriture et logement. La suite se fit dans la tradition du moment. Le notaire Romain Becquet, espérant que c'était la bonne fois, rédige le contrat de mariage de Mathurin Besnard dit Lajeunesse et Marguerite Viard le samedi 8 octobre 1672, en apportant des biens estimés à 300 livres et un don de 50 livres du roi. La cérémonie nuptiale fut célébrée le mardi 11 octobre 1672. Le curé Henri De Bernières, de la paroisse Notre-Dame de Québec, célèbre l'office en présence de Jean Houssye dit Larose, Jacques Guay, Jacques Tahie et André Roulet. Après un moment à Québec, le couple se déplace vers la Seigneurie de Chambly, près du Fort St-Louis. Le Seigneur Jacques de Chambly lui a octroyé la concession d'une terre située à la Côte St-Pierre, le dimanche 15 octobre 1673, moyennant une rente annuelle. L'aînée de la famille, Jeanne y serait née le dimanche 6 janvier 1675 et baptisée à l'église Ste-Famille de Boucherville le dimanche 10 février 1675. Une belle fille, Marie, naît le samedi 7 mai 1678. Elle est baptisée en l'église St-Pierre de Sorel, par le curé Benoît Duplein, le mardi 10 mai; son parrain est Jean Poirier et Marie Langlois, son épouse, est la marraine. Marie est le deuxième enfant de la famille.Vers 1680 naît un garçon, René, dont on ne retrouve aucune trace de son baptême dans les registres paroissiaux de l'époque. 9 Au recensement de 1681, on situe la terre de Mathurin entre Jean Poirier et Charles Paquet, ayant 3 bêtes à cornes et 10 arpents en valeur. Le nom de Marguerite Viard à cette occasion est Bourbier, épouse de Mathurin Besnard. Ceci confirme que c'était bien Marguerite Viard lors du contrat de mariage avec Jean Fleuricourt en novembre 1671. Le mercredi 11 juin 1681, Marguerite a reçu, à 29 ans, le Sacrement de Confirmation à la paroisse St-Joseph de Chambly. Mathurin Besnard-Lajeunesse - Marguerite Viard ( Fiche familiale ) Prénom Naissance Baptême Mariage Décès Sépulture Jeanne 06-01-1675 Chambly 10-02-1675 Ste-Famille Boucherville 02-01-1690 Jean Cousineau Notre-Dame Montréal 08-05-1749 09-05-1749 La Visitation Sault-au-Récollet Marie 07-05-1678 10-05-1678 St-Pierre Sorel 31-10-1695 François Gloria Notre-Dame Montréal ----------------- 18-11-1698 Noël Legault Deslauriers Notre-Dame Montréal ??-06-1760 03-06-1760 St-Joachim Pointe-Claire René Vers 1680 Vers 1680 21-07-1710 Anne Gibeau Notre-Dame Montréal 26-04-1733 26-04-1733 Notre-Dame Montréal Marguerite 30-10-1682 Chambly 30-10-1682 Très Ste-Trinité Contrecoeur 23-02-1699 Mathurin Chartier Notre-Dame Montréal ---------------- 23-01-1725 Guillaume Barbe Laforge St-Joachim Pointe-Claire 10 Mathurin Besnard dit Lajeunesse est probablement décédé le 21 octobre 1682, tout juste neuf jours avant la naissance de Marguerite le vendredi 30 octobre 1682. même si Mathurin est dit présent, probablement une erreur au registre de la paroisse de Contrecoeur, au baptême de sa fille Marguerite. Les Viard-Inart Second mariage de Marguerite à la paroisse Très Ste-Trinité de Contrecoeur avec Jean Inart dit Provençal le dimanche 1er novembre 1682. Le dimanche 7 mars 1683, devant le notaire Maugue, Jean Inart, maître-charpentier originaire de St-Jean, évêché d'Aix-en- Provence, et son épouse Marguerite Viard se départissent de la terre sur la Seigneurie de Chambly. Le couple Viard-Inart demeure à la prairie St-Lambert. Très peu d'informations sont disponibles sur le dit Inart. Certaines rumeurs allèguent qu'il a pris la route des Pays d'en Haut. Est-il décédé ou le dit mariage a été dissous pour " abandon de couche " ? Les Viard-Serran Un troisième mariage pour Marguerite est célébré le lundi 25 septembre 1684 à Laprairie paroisse La Nativité de la Bien Heureuse Vierge Marie avec Joseph Serran dit L'Espagnol, natif de la ville de Baldoly, Castille La Vieille en Espagne. Le contrat de mariage est passé le lundi 26 juin 1684, toujours devant le notaire Claude Maugue. Une histoire surprenante est relatée dans les documents judiciaires en date du 17 septembre 1688. Jean Dasny raconte à qui veut l'entendre que Joseph Serran dit L'Espagnol et Marguerite Viard, sa femme, lui ont volé les melons de son jardin potager. L'accusation est portée devant le bailliage. Mais voilà qu'un témoin va donner une toute autre version de l'affaire. Selon René Tabaut, ce serait plutôt Jean Dasny qui aurait enlevé les melons de force au couple Serran, alors qu'ils les rencontraient sur le chemin. Devenu accusé, Dasny sera condamné à réparation une dizaine de jours plus tard. 11 Ces cucurbitacées vont continuer à faire le régal des Canadiens bien après cette singulière rapine. A Montréal en septembre 1749, un melon vaut cinq ou six sols. Mais s'il est bien gros, précise Kalm: " il coûtera de quinze à vingt sols ". Certaines régions en produisent de forts succulents. Marguerite a eu plusieurs enfants avec Joseph Serran dit L'Espagnol. Un premier mort-né le mardi 6 février 1685: ou cette naissance est, de fait, une fausse-couche ou le mariage eut lieu alors que Marguerite était déjà enceinte. Joseph Serran-L'Espagnol - Marguerite Viard ( Fiche familiale ) Prénom Naissance Baptême Mariage Décès Sépulture Nouveau-né 06-02-1685 06-02-1685 Ondoiement 06-02-1685 06-02-1685 La Nativité de la Bienheureuse Vierge Marie Laprairie Jeanne 30-05-1686 02-06-1686 Notre-Dame Montréal 30-10-1702 Jacques Béique Lafleur Notre-Dame Montréal 19-05-1756 21-05-1756 St-François D'Assise Longue-Pointe Jacques ??-09-1688 19-09-1688 Notre-Dame Montréal Vincent ??-07-1691 01-07-1691 Notre-Dame Montréal François Marie 02-07-1694 11-07-1694 Notre-Dame Montréal 03-01-1718 Marguerite Descongé Archives Civiles Pointe aux Trembles 10-06-1731 11-06-1731 St-Laurent Marie Josèphe 19-04-1697 20-04-1697 Notre-Dame Montréal 26-08-1714 Jean Deslandes Champigny Notre-Dame Montréal 22-04-1732 23-04-1732 Notre-Dame Montréal Le vendredi 27 décembre 1715 le vicaire, Priat, de la paroisse Notre-Dame de Montréal, célèbre les obsèques de Marguerite Viard. |
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