3511 - Histoire d'Amour

Jeannine VERDON

Revue de Presse

Quelle histoire d'amour!

par Éric Trottier, La Presse, dimanche 15 juin 1997

Les retrouvailles n'auront pas lieu: Jeannine Verdon est décédée en 1964

par Isabelle Hachey, La Presse, mercredi 18 juin 1997

Réponse de Lynn, fille de Jeannine Verdon, à Robert Nault

Notes de Lynn Meilleur-Desbiens sur sa mère, Jeannine Verdon

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Quelle histoire d'amour!

Un Américain cherche Jeannine Verdon, qu'il n'a pas vue depuis 56 ans.

Mais où est donc Jeannine Verdon?

Robert Nault, un Franco-Américain de 77 ans tombé amoureux d'elle il y a 58 ans et qui l'a fréquentée durant un an avant d'être appelé par l'armée des États-Unis en 1940, lance un appel pour la retrouver.

«J'ai été marié pendant 54 ans (à une autre femme), mais jamais je n'ai cessé de penser à Jeannine, a raconté M. Nault à La Presse, hier, depuis son domicile de Deerfield Beach, en Floride. Maintenant que je suis veuf, j'aimerais tant la revoir. Qui sait? Si elle est seule aussi, peut-être que je pourrais réparer l'erreur de ma vie en la mariant...»

Né au New Hampshire en 1919, fils de parents québécois établis aux États-Unis, la famille de M. Nault est rentrée à Montréal à la fin des années 1930. Âgé d'une vingtaine d'années, Robert Nault fait la rencontre de la belle Jeannine Verdon, en 1939, lors d'une soirée de danse à l'auditorium de Montréal.

«C'est la plus belle femme que j'ai rencontrée dans ma vie, dit-il. Elle avait de beaux yeux bleus et des cheveux bruns. Je lui ai demandé de danser, elle a accepté...»

Le jeune couple entame donc une fréquentation ardue. Bientôt, tous les samedis soir, Robert se rend au domicile de Jeannine, au 3821 rue Wellington, à Verdun. «Nous passions la soirée à parler, à écouter la radio en nous tenant la main. Nous nous sommes embrassés mais ça n'a jamais été plus loin, parce que je me disais qu'il fallait garder ces choses-là pour notre première nuit de noces», se rappelle le romantique retraité.

Mais le sort à séparé nos deux tourtereaux quand Robert a été convoqué par l'armée américaine pour affronter les Allemands. Le jeune homme n'a pas eu le temps de faire sa demande en mariage: «Je voulais la marier après la guerre, car je ne voulais pas qu'elle devienne une veuve...»

Par un beau soir de mars 1941, Jeannine est donc allée le reconduire au terminus d'autobus de Montréal. Ils ne se sont plus jamais revus par la suite.

Les deux amoureux se sont écrits quelques lettres, puis, plus rien. Il faut dire que Robert était transféré d'un camp d'entraînement à l'autre et que l'armée américaine ne lui transmettait plus les lettres de sa Jeannine.

Celle-ci toutefois fini par le retracer dans un camp de la Caroline du Sud, en 1942. Au téléphone, elle lui a annoncé qu'elle allait se marier avec un autre homme. «Ça m'a brisé le coeur. J'aurais tant voulu rentrer à Montréal pour tenter de la convaincre de m'attendre. Mais en même temps, je me disais que c'était terminé...»

Après son service militaire, M. Nault s'est marié à son tour et a eu cinq enfants. Un mariage heureux, insiste-t-il, bien qu'il n'ait jamais cessé de penser à sa dulcinée. L'an dernier, sa femme est décédée. Depuis, il tente, avec l'aide de sa voisine de condo en Floride Mme Marguerite Bougaud, de Saint-Damien-de-Brandon au nord-est de Montréal, de retracer celle qui, aujourd'hui, doit avoir entre 75 et 77 ans.

Depuis deux mois, Mme Bougaud a tenté de retrouver Mme Verdon en faisant des recherches dans différents presbytères de Verdun. Elle a contacté la direction de l'Etat civile et s'est même rendue à l'ancienne adresse de Jeannine, rue Wellington, à Verdun. Mais la maison n'existe plus et Mme Bougaud n'a pas beaucoup d'indices. «Je n'ai même pas sa date de naissance...»

Jeannine Verdon travaillait à la compagnie Montreal Suspenders au début des années 1940. Dans les six lettres qu'elle a envoyées à M. Nault, que celui-ci conserve précieusement depuis tout ce temps, elle a mentionné avoir deux frères, Marcel et Gérard. M. Nault et Mme Bougaud ont tenté en vain de les retrouver.

Bref, si ces informations pouvaient éveiller un souvenir quelconque chez un de nos lecteurs, ou si les membres de la famille de Jeannine Verdon se reconnaissaient, ils pourrait appeler à La Presse (285-7070) afin que nous les mettrions en contact avec M. Nault.

«Je l'aime encore, dit-il. Je voudrais au moins lui parler une dernière fois pour savoir ce qui s'est passé dans sa vie. Elle est peut-être toujours mariée, mais si elle était veuve, who knows? Il n'est jamais trop tard pour bien faire...»

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par Éric Trottier, La Presse, dimanche 15 juin 1997
 


Les retrouvailles n'auront pas lieu:

Jeannine Verdon est décédée en 1964


Il est tombé follement amoureux d'elle il y a 58 ans. Le destin les a tragiquement séparés en 1941, lorsque l'armée américaine l'a convoqué pour combattre les Allemands. Mais il n'a jamais réussi à l'oublier et depuis des mois, Robert Nault, un Franco-Américain de 77 ans, tentait de retracer sa belle.

Après de nombreuses recherches infructueuses, M. Nault a contacté La Presse, la semaine dernière, afin de lancer un appel pour retrouver celle pour qui son coeur n'a jamais cessé de battre, la Québécoise Jeannine Verdon. Il disait vouloir «réparer l'erreur de [sa] vie en la mariant».

Mais les retrouvailles n'auront pas lieu. Jeanine Verdon est morte il y a 33 ans, en septembre 1964. «Croyez-le ou non, c'est la femme que j'ai le plus aimée dans ma vie. Je l'ai toujours aimée», a tristement laissé tomber M. Nault lorsque La Presse l'a joint à son domicile de Floride, hier, pour lui apprendre la triste nouvelle. «Si seulement j'avais été capable de lui parler», a-t-il dit, la voix étranglée par l'émotion.

Le mystère entourant Mme Verdon a été percé par Édouard Buissières, un Montréalais d'âge respectable qui se passionne pour la généalogie depuis le début des années 1980, lorsqu'il s'est amusé à retracer ses propres ancêtres. Depuis, sa petit marche de santé quotidienne le mène invariablement à la salle Gagnon de la Bibliothèque nationale, rue Sherbrooke, où sont archivés tous les mariages et les décès répertoriés au Québec entre 1926 et 1994.

«Lorsque j'ai lu l'article, je me suis demandé si ce n'était pas de la fabulation, explique M. Buissières. On faisait des recherches depuis des mois, et on n'avait rien trouvé.» Rapidement, il a découvert que Jeannine Verdon est effectivement née en 1924, qu'elle s'est mariée à 19 ans, et qu'elle est décédée en 1964. Une recherche qui n'a duré que dix minutes... «Je ne suis pas un rat de bibliothèque!» Se défend humblement M. Buissières. N'empêche qu'il avoue que les ancêtres de nombreux politiciens et autres personnalités publiques n'ont plus de secrets pour lui...

L'histoire de M. Nault a commencé il y a bien longtemps, en 1939, lors d'une soirée dansante à l'auditorium de Montréal. Une invitation à danser. Un véritable coup de foudre. Puis, une fréquentation passionnée jusqu'à ce jour fatidique de mars 1941 où le jeune Robert, né au New Hampshire et fils de parents québécois, est appelé à combattre les Allemands par l'armée américaine. Il doit quitter sa dulcinée.

Les deux tourtereaux ne se sont plus jamais revus. En 1942, alors que Robert était en service, Jeannine lui apprenait qu'elle allait bientôt se marier avec un autre homme. Depuis, même après un mariage heureux avec une Américaine (décédée l'an dernier), Robert n'a jamais réussi à chasser la belle Québécoise de son coeur. Aujourd'hui, il doit pourtant se résigner à mettre un point final à cette tragique histoire d'amour. Avec regrets. «J'aurais tellement aimé...

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par Isabelle Hachey, La Presse, mercredi 18 juin 1997


Réponse de Lynn, fille de Jeannine Verdon, à Robert Nault

Jeannine Verdon is my mother. She was born September 14, 1923, the youngest child of Felix-Ovila Verdon and Marie-Laura Carignan who had six (6) children: Simone (who died at a very young age before Jeannine was even born), Gérard, Armand, Arthur and Marcel (twins) and of course, Jeannine.

I know nothing of her life before 1939, when she met Robert Nault at a dance at the Verdun Auditorium. Robert and Jeannine were sweethearts for about one year. They split up in 1941 when Robert was drafted by the American Army (he was born in New Hampshire. Mr. Nault informed me that my mother had worked at "Montreal Suspenders". I remember my father saying that, while they were courting, Jeannine worked at "Harrison Brothers".

Soon after Robert's return to the USA, Jeannine met my father, Arthur Meilleur. They were married on December 5, 1942, at Notre-Dame-des-Sept-Douleurs, in Verdun, Quebec, Canada. They had five children.

When they were first married, the couple lived with Jeannine's parents at 3821 Wellington Street in Verdun. That is where their three (3) older children were born. Joanne was born at Christ-Roi Hospital, in Verdun.

When I was around 7 years old, my parents moved to 5358, 3rd Avenue, Rosemont. The family lived there for approximately three years. The youngest child, Marc, was born in that area of Montreal.

On March 26, 1955, the Meilleur returned to Verdun and lived at 3399 Evelyn Street for many years. This is where the family lived when Jeannine took sick. The memories that I have of my mother are mainly from those years.

First, I must say that our maternal grandmother (who we called "mémère") has always lived with our family. Her brother Gérard who was never married also lived with us for many years.

When we were children, my brothers played hockey and baseball. My father being involved in the local organisations, my mother learned to like these sports. She followed everyone of them to all their games and, as a family, we travelled around to tournaments. The ones I remember most were in Smith Falls, Ontario (I was about 12 years old at the time).

Jeannine was a very active woman. She kept the house clean, cooked for her family, invited her brothers and their families several times every week, since their mother lived with us. She was very popular amongst children and teenagers of our community. I remember our friends always being welcome. Our mother often baked chocolate cakes for us to share with our friends after Sunday morning mass.

Jeannine loved to dance (according to my father, they have won dancing contests many times), movies and shopping. She spent her spare time with her best friend, Adrienne Séguin, who lived a few doors down the street. She smoked a lot and hated the fact that she was overweight.

I like to remember her going to the corner store "Chez Lachapelle" where she would regularly get her Coca-Cola and candies for us. She would spend hours on end chatting with neighbors. This is where she sided with the neighborhood teenagers whenever someone would try to put them down.

Around 1961 or 1962, she was selected "Mother of the Year" by "Les Loisirs Notre-Dame-de-la-Paix" (the Parrish where we lived), for the time, energy and interest she gave to the community youth.

On June 24, 1963 (I was 18 years old), while watching a baseball game in which none of my brothers was playing, she suddenly felt weak. My father took her home immediately, and she went to sleep. The next day, around noon, she was still sleeping. My father got worried and called a doctor. He had her taken to the Christ-Roi Hospital, in Verdun. After a battery of tests, we were told that she was in a deep coma and had a blood clot on her brain. She remained in that coma until September 27, 1964 (15 months later) without even opening her eyes. That is when she died at Notre-Dame-de-Lourdes Hospital, on Pie IX Boulevard, in Montreal where she had been transferred on June 25, 1964. She had turned 41 years old 13 days earlier.

To thank her for her involvement, all of our friends got together and sent flowers (they told us after that they loved her like a mother). The community youth wanting to show their appreciation, majorettes and a marching band walked her to her last rest, to the sound of a funeral drum . It was almost like a "civil funeral".


---- Notes de Lynn Meilleur-Desbiens sur sa mère, Jeannine Verdon -----

Jeannine Verdon est ma mère. Elle est née le 14 septembre 1923, cadette du mariage de Félix-Ovila Verdon et de Marie-Laura Carignan. Ovila et Laura ont eu six (6) enfants: Simone, décédée en très bas âge, longtemps avant la naissance de Jeannine, Gérard, Armand, les jumeaux Marcel et Arthur, et, évidemment, Jeannine. J'ignore tout de sa vie jusqu'en 1939, où elle rencontre Robert Nault lors d'une soirée dansante à l'Auditorium de Verdun. Jeannine et Robert se fréquentent pendant environ une année et se voient séparés en 1941 lorsque Robert est rappelé par l'armée Américaine (il est né au New Hampshire). Je sais cependant par Monsieur Nault que, pendant sa jeunesse, ma mère a travaillé chez "Montreal Suspenders". Mon père m'a souvent dit qu'elle travaillait chez Harrisson Brothers pendant leurs fréquentations.

Peu de temps après sa séparation d'avec Robert, Jeannine rencontre mon père, Arthur Meilleur, qu'elle épousera le 5 décembre 1942 à l'église Notre-Dame-des-Sept-Douleurs, à Verdun. Leur famille comptera cinq (5) enfants:
 

1.    Richard, né le 30 septembre 1943, à Verdun (3821, rue Wellington)
2.    Lynn, née le 28 mars 1945, à Verdun (3821, rue Wellington)
3.    Daniel dit Danny, né le 18 février 1948, à Verdun (3821, rue Wellington)
4.    Joanne, née le 24 novembre 1951, à l'hôpital du Christ-Roi de Verdun
5.    Marc né le 4 octobre 1954, à l'hôpital Ste-Jeanne d'Arc de Montréal.

Au tout début de leur mariage, Arthur et Jeannine vivent chez les parents de Jeannine, au 3821 rue Wellington, à Verdun, où naîtront leurs trois (3) aînés. J'ai très peu de souvenirs des années que la famille a passées à cette adresse. Alors que j'avais sept (7) ans, Arthur et Jeannine déménagent au 5358, 3è Avenue, à Rosemont, pour y vivre environ trois ans. Marc, le cadet de la famille, est d'ailleurs né dans ce secteur de la ville de Montréal. Le 26 mars 1955, la famille Meilleur revient s'installer à Verdun. Ils habiteront au 3399 rue Évelyn pendant de nombreuses années. Les souvenirs que j'ai de maman datent plutôt de cette période. Tout d'abord, je dois mentionner que ma grand-mère maternelle (que nous appelions "mémère") a toujours habité avec notre famille. En plus, Gérard, le frère de maman qui était célibataire, a chambré chez nous pendant de nombreuses années. Lorsque nous étions enfants, mes frères, Richard et Daniel (et plus tard, Marc) pratiquaient le hockey et le baseball. Mon père étant très impliqué dans les organisations locales, maman a appris à apprécier les sports. Elle suivait papa et mes frères partout où leurs équipes respectives les menaient. Nous avons donc participé en famille, à des tournois, dont plusieurs de baseball à Smith Falls, en Ontario.

Jeannine était une femme très active. Elle entretenait la maison, préparait les repas pour la famille, recevait ses frères et leurs familles plusieurs fois par semaine, sa mère habitant avec nous. Elle était très populaire auprès des jeunes. Je me souviens que nos amis étaient toujours les bienvenus chez nous et que maman nous préparait souvent des gâteaux au chocolat que nous partagions avec eux. Maman avait les cheveux châtain clair et les yeux bleux. Elle aimait la danse, le cinéma, le magasinage et partageait ses loisirs avec son amie, Adrienne Séguin, une voisine de la rue Évelyn. Elle fumait beaucoup et souffrait de son excédent de poids. J'aime me rappeler qu'elle allait souvent au petit dépanneur du coin appelé "chez Lachapelle", rue Évelyn pour se chercher de Coca-Cola. Elle pouvait y passer des heures entières à échanger avec les voisins sur ce qui se passait dans le voisinage. C'est là qu'elle défendait les jeunes du quartier contre les gens qui tentaient de les dénigrer. Jeannine souffrait d'hypertension, mais je ne me souviens pas l'avoir vue malade très souvent. À l'âge de 37 ou 38 ans, elle fait une fausse-couche et doit être hospitalisée à l'hôpital Reddy Memorial de Montréal. Le 24 juin 1963, alors qu'elle assistait à une joute de baseball à laquelle aucun de mes frères ne participait, Jeannine eut un malaise soudain (elle avait 39 ans). Mon père la ramena à la maison. Le lendemain midi, parce qu'elle dormait toujours, papa a fait demander un médecin qui la fit transporter à l'hôpital du Christ-Roi de Verdun et qui diagnostiqua un coma profond occasionné par un "caillot de sang au cerveau". Elle est restée dans ce coma jusqu'au 27 septembre 1964 (15 mois plus tard) sans jamais ouvrir les yeux et est décédée à l'hôpital Notre-Dame-de-Lourdes, boulevard Pie IX, à Montréal d'une pneumonie. Elle avait eu 41 ans 13 jours plus tôt.
 


Recherche par Lynn Meilleur Desbiens, de Verdun

Mise à jour le 15 janvier 2002 par Paul Meilleur, de Ste-Adèle

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paul.meilleur@yahoo.com